Scandale : la Société générale rempile

Publié le 7 Août 2009



C’est une histoire qui doit bien faire rigoler Jérôme Kerviel. Son ex-patron, Jean-Pierre Mustier, qui fut le tout puissant directeur général adjoint en charge de la banque de financement et d’investissement de la Société générale, se retrouve à son tour sur le banc des accusés. Poursuivi par l’Autorité des marchés financiers (AMF) pour délit d’initié, il a démissionné hier. L’information, révélée par le site internet du Nouvel Observateur, a été confirmée peu après par la banque. Selon le gendarme de la Bourse, Mustier aurait revendu en août 2007 des actions de sa banque en disposant d’informations privilégiées, touchant un confortable bénéfice au passage, avant que le cours de cette dernière ne chute. Un autre responsable de la banque, Robert Day, un administrateur américain, est lui aussi accusé de délit d’initié.


Enquête.
De manière assez paradoxale, les délits reprochés à Mustier et Day ne sont pas liés à l’affaire Kerviel, mais c’est par la faute du jeune trader qu’ils se retrouvent aujourd’hui mis en cause. Ainsi, c’est peu après la révélation des 5 milliards de pertes causés par les opérations de Kerviel que l’AMF décide d’ouvrir une enquête. Fin janvier 2008, très exactement. En cause, l’information financière fournie par la banque sur cette affaire, mais aussi sa communication quant à son exposition aux subprimes. Pendant des mois, Daniel Bouton, le PDG à l’époque, a assuré n’être exposé que «marginalement» aux crédits immobiliers américains toxiques, déclencheurs de la crise à l’été 2007. Et puis, le 24 janvier 2008, jour de la révélation de l’affaire Kerviel, la banque change de discours. Elle reconnaît un autre sinistre : 2 milliards de pertes dus à des dépréciations massives dans son portefeuille de produits structurés liés au marché immobilier américain.

Et, comme les malheurs s’enchaînent, on apprend que Robert Day, un des administrateurs, a vendu un très gros portefeuille d’actions de la Société générale au cours de janvier. Ex-propriétaire d’une société de courtage qu’il avait vendue à la banque, Day a vendu pour 98 millions d’euros de titres en quelques jours.

L’AMF ouvre alors une enquête pour délit d’initiés et examine l’ensemble des transactions effectuées par les dirigeants de la banque depuis le début de la crise. Et prend Mustier dans ses filets : pour une opération qui date du 21 août 2007. A l’époque, Mustier était rentré précipitamment de ses vacances, qu’il passait en Ecosse, et avait ordonné au gestionnaire de son portefeuille boursier de tout liquider, dont une partie des actions Société générale qu’il détenait. Selon l’AMF, Mustier aurait agi ainsi car il savait que le cours de sa banque allait s’effondrer à cause de son portefeuille de subprimes. Le bénéfice retiré de la vente des actions de sa banque aurait atteint 200 000 euros.


«Tranquille».
Mais Mustier raconte une autre histoire. Selon lui, c’est parce qu’il avait constaté des mouvements étonnants sur le cours des bons du Trésor américains, un signe de chute future des marchés, qu’il aurait décidé de liquider ses actions. Au Nouvelobs.com, il justifie ainsi cette opération : «Je voulais avoir l’esprit tranquille pour m’occuper des risques de la banque et ne pas avoir à me soucier en parallèle de mes actifs propres.» Dans un mail adressé à ses collaborateurs, il ajoute que «les titres Société générale vendus représentaient une faible partie de ce portefeuille» et qu’il avait tenu à en conserver la moitié, «du fait de ses fonctions au comité exécutif de la banque».

Mais ces arguments n’ont pas satisfait l’AMF. Qui a décidé de le poursuivre, ainsi que Robert Day. En revanche, le gendarme de la Bourse n’a retenu aucun grief contre la banque, au titre de l’information financière. Il n’empêche, cette double accusation est un coup dur pour la Société générale. Et son image, déjà écornée par l’affaire Kerviel. Certes, du fait des opérations du jeune trader, Mustier n’était plus aussi puissant qu’auparavant. Il avait perdu son poste de patron des salles de marchés. Mais le nouveau PDG, Frédéric Oudéa, lui avait confié une tâche de confiance en le nommant en septembre 2008 à la tête du pôle gestions d’actifs. A charge pour lui de se débarrasser du boulet de la filiale Sgam, qui avait aussi multiplié les pertes. Mustier avait rempli sa mission à merveille, en engageant sa fusion avec Caam, la filiale du Crédit agricole en gestion d’actifs. Depuis, la rumeur interne le voyait revenir dans la banque d’investissement.

La banque a une autre version. Selon un communiqué publié hier, elle note qu’il était en fait prévu que Mustier quitte le groupe fin 2009, «à la conclusion de l’opération de rapprochement entre Sgam et Caam». Mais qu’il a «souhaité, dans l’intérêt du groupe, anticiper ce départ, et a remis sa démission, qui a été acceptée».



Source : http://www.liberation.fr/economie/0101584067-scandale-la-societe-generale-rempile

Rédigé par FO 3M SOA

Publié dans #DIVERS

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